ARCHIVES D’UNE FLAMBOYANTE METAMORPHOSE

La Bibliothèque de Genève présente dans le Couloir des coups d’œil une sélection de précieux documents illustrant la restauration, entreprise dans les années 1870-1880, de la chapelle des Macchabées. Parmi les documents exposés, de rares dessins du célèbre architecte français Viollet-le-Duc illustrent les différents projets envisagés pour redonner à la chapelle son aspect flamboyant et médiéval. Les différents dessins et plans exposés témoignent des réflexions entreprises à l’époque concernant la manière de restaurer un ancien monument et du regard porté sur la conservation du patrimoine.

Contrairement au reste de la cathédrale Saint-Pierre qui manifeste une sobriété typiquement protestante, la chapelle des Macchabées se distingue par ses décors remarquablement colorés et lumineux d’une richesse extraordinaire. Construite entre 1397 et 1405, la chapelle des Macchabées (qui s’appelait alors la chapelle collégiale Notre-Dame avant de changer de nom en 1460) est le premier édifice de style gothique flamboyant de Suisse. Commandée par l’influent cardinal Jean de Brogny, la chapelle a été prévue pour accueillir sa sépulture, ce qui explique le soin particulier apporté à la décoration. En août 1553, lors de la Réforme, la cathédrale change de statut et devient un lieu de culte protestant, le mobilier liturgique est réemployé, détruit ou vendu, les murs sont recouverts de badigeon et la chapelle des Macchabées est délaissée puis devient un dépôt. En 1566, la chapelle est réaménagée afin d’abriter l’auditoire de théologie de l’Académie. Les transformations opérées dissimulent les origines médiévales de la chapelle. 

 

Peu avant le milieu du XIXe siècle, l’art du Moyen Âge bénéficie d’un soudain engouement auprès des intellectuels et des artistes de l’époque. Victor Hugo dénonce l’état désastreux de Notre-Dame de Paris de son roman éponyme publié en 1831. Le public prend alors conscience de la valeur historique de ces monuments. À ce même moment, la chapelle des Macchabées n’est pas mieux lotie, son état est si mauvais que l’idée de démolir la chapelle est envisagée. Finalement en 1845, l’architecte genevois Jean-Daniel Blavignac est engagé afin d’établir un projet de restauration. Bien que ces propositions n’aient jamais abouti, il a néanmoins joué un rôle fondamental en mettant en lumière la richesse des décors anciens de la chapelle qui étaient alors dissimulés sous les badigeons. En 1874, Eugène Emmanuel Viollet-le-Duc, qui s’est réfugié en Suisse après avoir été condamné à mort par la Commune de Paris, est choisi pour proposer un projet de restauration de la chapelle. Ces idées inventives qui prennent pour modèle la Sainte-Chapelle de Paris ne verront finalement jamais le jour mais elles témoignent du regard autrefois porté sur la restauration qui se base sur une forme de réinterprétation d’un passé médiéval fantasmé et non sur l’analyse des données archéologiques. 

VIOLLET-LE-DUC À SAINT-PIERRE

Jusqu’au 12 septembre 2020 

Bibliothèque de Genève

Promenade des Bastions 1

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