VIK MUNIZ : L’ART DE L’ILLUSION

Vik Muniz, vue de l’exposition, Xippas Genève © Photograhie: Julien Gremaud

La Galerie Xippas frappe fort en ce début d’automne avec une importante exposition personnelle de l’artiste brésilien Vik Muniz. À cette occasion, les deux espaces de la galerie ont été entièrement investis par plusieurs de ses récentes œuvres tirées de la série « Surfaces ». Réalisée entre la fin de l’année dernière et cette année, les œuvres exposées célèbrent le cubisme tout en le réinventant au moyen du photo collage. Avec une ingéniosité qui lui est propre, Vik Muniz parvient sans cesse à jouer avec notre perception et à déstabiliser notre œil, augmentant ainsi notre curiosité. En brouillant volontairement les frontières entre la peinture et la photo, la réalité et l’illusion, ses pièces uniques déstabilisent autant qu’elles fascinent. Un voyage parmi des trompes l’œil d’un nouveau genre qui questionnent notre rapport aux images et à l’art. À ne rater sous aucun prétexte. 

« Est-ce un Picasso ? Ou bien un Braque ? » se demandent les passants devant l’espace de la Galerie Xippas à la Rue du Vieux-Billard. « Et là, on dirait la Starry Night de Van Gogh non ? » Alors oui, il s’agit bien de la Nuit étoilée au fond de l’espace épuré de la Rue des Sablons, mais non ce n’est pas celle peinte par Vincent Van Gogh ; le Museum of Modern Art (MoMA) de New York la garde précieusement. Celle-ci est toute récente, elle vient d’être réalisée par Vik Muniz qui cherche une fois encore à nous troubler en réinventant les œuvres les plus célèbres de l’Histoire de l’art. Après avoir transformé plusieurs œuvres phares en les dessinant à partir de chocolat fondu comme le portrait de Marilyn Monore d’Andy Warhol ou encore l’Extase de sainte Thérèse du Bernin (visible dans l’espace de la Rue des Sablons), et après avoir retourné les chefs d’œuvres des plus grands musées comme la Joconde et les Ménines de Vélasquez dans la série Verso, le virtuose brésilien s’attaque cette-fois ci aux œuvres cubistes et à ses plus fameux représentants. 

Vik Muniz, Woman with Phlox, d’après Albert Gleizes, 2022, technique mixte, 103,9 x 129,4 cm

Encadrées dans leurs cadres de bois, les six œuvres d’inspiration cubiste contiennent un monde en soi. De loin, elles ressemblent à d’imposantes peintures. De près, ce sont des collages. La confusion est totale. S’agit-il de peintures, de collages ou de photographies ? En fait, il s’agit d’un subtil mélange de toutes ces techniques. Vik Muniz mêle les médiums et les approches avec une liberté et une virtuosité déconcertante. Ses œuvres sont le produit de plusieurs images peintes, photographiées, transformées, rephotographiées et retravaillées. Un procédé presque magique qui lui est propre et qui crée un effet de trompe l’œil absolument unique. En jouant avec nos perceptions, l’artiste interroge notre vision du réel et challenge notre œil. Et alors que les peintres comme Picasso, Braque, Gleizes et Juan Gris ont développé le cubisme en réponse au plan plat induit par la photographie, Vik Muniz parvient à la libérer de son plan en deux dimensions grâce à sa manière si singulière de photographier différentes couches picturales afin de créer une image composite inédite. Ses œuvres uniques et innovantes font appel à différents sens du spectateur. Ainsi il est invité à regarder les images par-delà le simple regard, en mettant à contribution ses ressentis et sa mémoire. Vik Muniz explique : « Lorsque l’on bouge son œil, on anime le monde ». Et il ne croit pas si bien dire ! En suscitant la curiosité, il nous incite à bouger autour de l’œuvre car la photo n’est jamais véritablement statique : toute stimulation visuelle est mouvante. Un parcours artistique saisissant qui revisite notre perception de l’art, de la photographie, du collage, de la peinture et de l’Histoire de l’art en général. À découvrir absolument jusqu’au 29 octobre à la Galerie Xippas. 

Vik Muniz, Seated Woman in Garden, 2022 Technique mixte, 136,9 x 113,9 cm

Né en 1961 à São Paulo, Vik Muniz commence par étudier la publicité à la Fundação Armando Álvares Penteado avant de quitter le Brésil pour les États-Unis où il démarre sa carrière en tant qu’artiste aux débuts des années 1980. Rapidement, il se différencie des autres en imposant son style personnel mêlant des éléments « low-tech » qu’il photographie ou en réinventant les œuvres les plus emblématiques de l’art. En transformant des matériaux aussi divers qu’étonnants qu’il photographie ensuite, Vik Muniz produit des images déconcertantes et ambiguës qui titillent nos perceptions et questionnent notre rapport aux images, à la vue, au réel et à l’illusion. Aujourd’hui, il vit et travaille entre Rio de Janeiro et New York. Ses œuvres font partie de nombreuses collections publics et privées de renom dont le MoMA de New York, le J. Paul Getty Museum de Los Angeles, le Centre Georges Pompidou de Paris et la Daros Latin America collection à Zurich. Il est représenté par les galeries Xippas à Genève, Paris, et Punta Del Este. En parallèle de son travail d’artiste, il entreprend des actions et des projets participatifs afin d’aider la communauté brésilienne. Son travail a par ailleurs fait l’objet du film « Waste Land » qui a été récompensé au Sundance Film Festival en 2010, et qui a été nominé pour l’Oscar du meilleur film documentaire en 2011 (rien que ça !). Un artiste au grand cœur qui maîtrise à la perfection l’art de l’illusion. 

VIK MUNIZ
Jusqu’au 29 octobre 2022

Galerie Xippas
Rue des Sablons 6
Rue du Vieux-Billard 7
1205 Genève

www.xippas.com 

www.vikmuniz.net