L’éternel été de Jacquemus

Défilé Les Santons de Provence, Jacquemus Collection Printemps-Eté 2017, ©Charlotte Lapalus

Le soleil qui brûle notre peau, le bruit des vagues, le sel dans les cheveux, la pinède, les herbes sèches au milieu des champs de lavande, autant de synonymes de l’été qui semblent décrire à la perfection le jeune prodige de la mode française, Simon Porte. Enfant du Sud de la France, amoureux de Marseille, et des couleurs du Midi, le designer met au coeur de sa marque Jacquemus un désir d’été éternel qui s’uni à une promesse alléchante : une mode minimaliste et ensoleillée incarnant la dualité d’une femme universelle. Tiraillée entre sensibilité et une honnête réalité, parfois plus brutale, déshabillée de ses couleurs de layettes et de ses préjugés. Aujourd’hui à la tête d’une des marques les plus en vue de la sphère mode, le jeune créateur français, passé maitre dans l’art du vêtement essentiel à notre garde-robe et de l’accessoire excentrique,  n’a pas finit de nous faire rêver de soleil éternel et d’une mode facile à vivre et à aimer. Un rêve aux senteurs de Provence et aux allures d’infinis étés.

Une mode née loin de Paris

C’est étonnant comme la mode nous rappelle parfois à d’autres arts. En observant les collections de Jacquemus, mais en épiant également le compte Instagram de son jeune créateur, Simon Porte, il est presque impossible de résister au voyage auxquels le designer et sa marque nous invitent. Ils nous rappellent les pages d’un livre que nous tournons inlassablement alors que se succèdent les paysages et la vie simple et douce dans un village niché au coeur de la Provence. Un champ de lavandes infini, un panier rempli des légumes du marché, une terrasse à l’ombre des arbres à la fin du printemps, bien plus qu’une marque de prêt-à-porter et d’accessoires, Jacquemus nous raconte une histoire. Tout d’abord celle de son créateur, Simon Porte, un jeune homme ambitieux ayant grandit à Mallemort un village situé à quelques kilomètres de Marseille, où il a été dès le plus jeune âge imprégné par l’esthétique et les codes du Sud de la France. Il passe ses jeunes années dans la campagne française, vivant d’une vie simple et insouciante, fils de maraichers, passant ses weekends au marché pour aider sa famille, vendant des bouquets de lavande aux touristes parisiens.

Le chapeau Bomba, par ©Jacquemus

De son enfance, il ne garde pas seulement des souvenirs, car celle-ci, cette vie, n’appartient pas au passé mais est toujours la sienne aujourd’hui malgré le succès grandissant de sa marque, son atelier à Paris, et sa vie qui l’emmène aux quatre coins du monde. Mais c’est dans cette enfance dorée par les rayons du soleil et au parfum de lavande que naitra Jacquemus. Ses grands chapeaux de paille démesurés, mais aussi une simplicité qui démontre une vie loin du faste, et un désir de soleil, de bonne humeur, toujours de grand air et de bonheurs simples. En réalité, lorsque l’on prête attention aux détails de ses collections, à cet amour pour les couleurs pastel, mais aussi solaires, au choix des matériaux, du coton léger, de la paille dorée, alors qu’un artichaut se balade sur une chemise et que les fleurs du jardin de ses grands-parents deviennent boucles d’oreille, on réalise que Jacquemus est un livre ouvert sur la vie de son créateur. Mais si Simon Porte aime raconter des histoires à travers ses collections, il souhaite par-dessus tout que ses récits soient simples à comprendre. Pas de mystère chez Jacquemus, mais une volonté d’accessibilité, presque naïve. C’est ainsi que nous pourrions peut-être le mieux décrire le style Jacquemus. Emprunt d’une délicieuse candeur aux couleurs pastel et au parfum de lavande, où se dévoile une vie en filigrane qui nous fait rêver de simplicité et de retour aux sources. Une façon d’être et de vivre auxquelles les créations Jacquemus vont à merveille.

Candeur solaire

Aujourd’hui Simon Porte est reconnu dans le monde entier pour ses talents de designer, mais son obsession première reste le cinéma, et ce désir de raconter des histoires s’il ne s’est pas encore manifesté sur un écran a su trouver son chemin à travers les vêtements. Son amour pour les vêtements, les uniformes, mais aussi les femmes, allié à son désir de création le menèrent à Paris où il commença à suivre une formation dans une école de design. Loin de sa vie à la campagne il espérait trouver une capitale bouillonnante, colorée, passionnée, mais la réalité est bien loin du rêve, et un mois après son arrivée il perd sa mère, une de ses plus grands inspirations, celle qui lui a appris la beauté et la satisfaction dans la création. Ce drame le rappelle à la réalité, et il quitte alors l’école de design pour créer Jacquemus, à seulement 19 ans.

Défilé Les Santons de Provence, Jacquemus Collection Printemps-Eté 2017, ©Charlotte Lapalus

Le jeune créateur débarque alors dans un monde dont il ne connait rien, avec deux mois d’expérience en école de mode dans la poche, sa passion, et rien d’autre. Et pourtant Simon Porte parvient en quelques années à séduire la sphère mode avec son style solaire, largement inspiré de sa mère – le nom de sa marque Jacquemus était le nom de jeune fille de celle-ci -, et à la candeur qui nous fait rêver d’une mode plus honnête, plus pure.  Si ses premières années sont difficiles, dès 2013 il se fait remarquer et en 2017 sa collection intitulée Les Santons le propulse sur le devant de la scène parisienne. Le vrai génie de ses créations réside alors dans ses silhouettes à la fois souples et construites avec une véritable conscience du corps de la femme, une volonté profonde de faire de ses vêtements des tenues seyantes. Si sa mère l’a inspiré, c’est surtout dans son attitude, de femme libre, méditerranéenne, désireuse de plaire et de se faire belle, sans honte. Des robes fluides aux coupes sexy parsèment alors ses collections, où la paille version chapeau ou panier de plage est reine et synonyme d’une mode solaire. Difficile de ne pas tomber amoureux de ses imprimés fleuris si naïfs, de ses accessoires aux allures de bonbons acidulés, ou encore de ses coupes originales mais au tombé toujours seyant, refusant de cacher le corps, mais le montrant avec goût. Des coupes pensées pour la femme. La femme Jacquemus qu’il définit comme à la fois brute et fragile, une femme qui existe, puisée dans son enfance, et non un fantasme déguisé sur un podium. Une mode pure dont les leçons n’ont pas été tirées dans une grande école parisienne, mais au milieu d’un verger où chantent les cigales.