Les artistes des demain

©Gaia Vincensini

Cette année, et ce depuis 64 ans, la Ville de Genève renouvelle son engagement auprès de la communauté artistique de la cité par l’attribution de deux bourses de soutien à des artistes en devenir, l’un dans le domaine des arts appliqués, le second dans celui des arts plastiques. Faire de cette passion une réalité est une tâche complexe et longue, où l’argent joue également son rôle. La ville, désireuse de participer aux succès de la création contemporaine genevoise, a en septembre dernier choisi ses deux lauréats qui pourront alors produire une œuvre originale contribuant à l’évolution de leur carrière en temps que créateur. Comme depuis maintenant vingt-et-un ans, le Centre d’Art Contemporain de Genève exposera également le travail des douze jeunes talents sélectionnés, permettant alors à leur travail d’obtenir une résonance internationale de premier ordre. Rencontre avec les lauréats de cette année.

La réalité d’un rêve

Le domaine de l’art contemporain attire toujours de plus en plus de jeunes artistes talentueux, mais les moyens leur étant attribués restent malheureusement faibles. À Genève cependant, une chance unique est offerte aux créateurs de la vie artistique de la cité, qui chaque année, peuvent prétendre à l’obtention d’une bourse d’une valeur de 10’000 francs dans le but de financer une œuvre de leur choix. Cette opportunité leur est rendue possible grâce à la générosité de trois philanthropes genevois ayant légué leurs fortunes à la ville, et constituant aujourd’hui les Fonds Berthoud, Galland, et Lissignol-Chevalier, en place depuis 1955. Exceptionnellement cette année, seulement deux bourses complètes seront attribuées, contrairement aux trois habituelles. En effet, après avoir pris connaissances des travaux des douze candidats, la ville a décidé d’attribuer 1’000 francs à chacun des jeunes nominés ne remportant pas les prix, permettant ainsi à un plus grand nombre de talents naissant de faire grandir et mûrir leurs projets artistiques. Derrière cette décision transparait la lucidité de la ville sur les conditions de travail des jeunes artistes et les difficultés qu’ils traversent tant au niveau de la rémunération que de la reconnaissance. Le Centre d’Art Contemporain soutient lui aussi les nominés tout comme les gagnants de la bourse en proposant une exposition leur étant consacré durant un mois. Une opportunité pour les jeunes créateurs de se faire connaitre, mais également une chance pour le public genevois de découvrir des talents locaux et plein de promesses.

Un futur prometteur

Le jury, notamment composé cette année de Marco Constantini, conservateur au MUDAC, à Lausanne, de Julien Fronzacq, conservateur en chef du MAMCO, ou encore de l’artiste et enseignante à la HEAD, Delphine Reist, a choisi cette année comme grands gagnants Coline Mir dans la catégorie des arts plastiques, et Jean-Marie Fahy dans le domaine des arts appliqués. La première lauréate, Coline Mir, propose avec son projet Automotiv une approche sculpturale d’un objet de design au premier abord commun, la chaise. Cet objet fait pour que l’on puisse s’assoir devient sous les mains de la jeune créatrice tout autrement complexe alors que s’y ajoute les langages et les enjeux de l’art contemporain. Son travail technique vient alors apporter une ambiguïté certaine à la chaise qui devient sculpture de son occupant absent, une représentation du corps qui l’a quitté sans pour autant le remplacer. Les objets métamorphosés s’imbriquent les uns dans les autres, l’absence de corps prend place sur la chaise qui est maintenant sculpture. Un travail choisi et salué par le comité de sélection pour son caractère unique.

©Coline Mir

Second lauréat dans la catégorie des arts plastiques, Jean-Marie Fahy propose quant à lui une œuvre profondément ancrée dans la réalité de notre époque. Mêlant graphisme, mise en page, installation et illustration, il retrace ses voyages à travers des textes, des interviews, des mots échangés via internet, lors de son séjour entre Israël et le Liban. Son point convergeant ? Les sites de rencontre Tinder et Grindr. À travers ces échanges, il nous propose de découvrir les peurs mais aussi les désirs d’une jeunesse évoluant dans un contexte complexe, mêlant instabilité politique et course à la consommation. À quoi rêvent-ils ? À leur futur, ils rêvent de se soulever et de toute changer, mais pensent aussi à leurs prochains voyages, à leurs futures rencontres. Un projet qui s’apparente à un travail de recherche impliquant personnellement l’artiste qui nous laisse lire sans retenu ses échanges. Une œuvre qui nous invite à voir notre monde à travers les yeux d’inconnus vivant une autre réalité que la nôtre.

Encore une fois cette année les lauréats des bourses de la ville nous proposent des œuvres inspirantes qui nous rappellent avec brio que Genève est sans aucun doute une cité aux nombreux talents, un paysage où évolue les artistes de demain.

décidé d’attribuer 1’000 francs à chacun des jeunes nominés ne remportant pas les prix, permettant ainsi à un plus grand nombre de talents naissant de faire grandir et mûrir leurs projets artistiques. Derrière cette décision transparait la lucidité de la ville sur les conditions de travail des jeunes artistes et les difficultés qu’ils traversent tant au niveau de la rémunération que de la reconnaissance. Le Centre d’Art Contemporain soutient lui aussi les nominés tout comme les gagnants de la bourse en proposant une exposition leur étant consacré durant un mois. Une opportunité pour les jeunes créateurs de se faire connaitre, mais également une chance pour le public genevois de découvrir des talents locaux et plein de promesses.

 

 

Bourses de la Ville de Genève 2019, Berthoud, Lissignol-Chevalier et Galland pour la Jeune Création Contemporaine, Centre d’Art Contemporain Genève, du 13 septembre au 13 octobre 2019, Rue des Vieux-Grenadiers 10, 1205 Genève.