Le design entre terre et ciel

Studio Furthermore Moon Rock
©Mihail Novakov

Depuis la nuit des temps, l’espace fascine. Il est la toile parfaite pour projeter nos fantasmes, nos croyances, se fait charte de notre destin, et depuis quelque temps, un lieu à coloniser. De la littérature aux arts visuels, il a fait l’objet de nombreux mots et représentations. Mais le mystère qui l’entoure a aussi rejoint les sphères du design, nous amenant aujourd’hui à la nouvelle saison du MUDAC, Space is the place. Divisée en deux expositions, elle nous invite à tourner le regard vers les cieux, puis à prendre de la hauteur et observer notre Terre. À travers des objets de design, mais aussi d’architecture, et des installations, nous explorons cet univers fascinant qui a inspiré plus d’un esprit créatif. Si la science tient sa place dans ces créations, c’est une vision plus poétique qu’offrent ces artistes et designers, nous rappelant qu’au-delà des faits le cosmos reste avant tout un monde de mystères où la beauté domine. Un premier pan de l’exposition qui fait pendant au second, nous interrogeant sur la Terre comme objet de design et les conséquences de cette vision occidentale. Un projet du MUDAC au double point de vue qui nous rappelle qu’au final, face à l’univers, nous sommes minuscules.   

 

Cosmos
Le monde des arts, des visuels aux arts vivants, en passant par la musique et la littérature, a depuis toujours été influencé par la fascination que le cosmos exerce sur l’humain. Le design en tant que discipline n’a pas échappé à cette emprise, et au fil des décennies les créateurs ont multiplié les objets directement inspirés par ce cosmos énigmatique et merveilleux à la fois. Une fascination qui se manifeste dans des objets du quotidien, dont on compte ici de nombreux luminaires notamment, au design directement inspiré des astres évoluant dans le cosmos et des différents phénomènes observés depuis la Terre. Faisant appel à une large variété de matériaux, les designers d’hier et d’aujourd’hui s’attellent alors à reproduire à leur façon ces observations. Ainsi, le soleil, la lune, les éclipses ou encore les météorites et matériaux lunaires se font base de leurs créations. Parmi les pièces ici présentées, on remarque la Moon Rock Collection du Studio Furthermore. Une collection de mobilier réalisée en 2015 poussée par les recherches du duo Marina Dragomirova et Iain Howlett en quête de matériaux inspirés des recherches scientifiques, mais aussi des processus naturels de création. Cette composition de mobilier et de luminaires en aluminium vient alors simuler la roche lunaire, nous donnant la sensation d’objets taillés dans une pierre venue d’ailleurs. La lune semble particulièrement dominante dans les sources d’inspiration cosmique des designers. On la retrouve par exemple dans le luminaire imaginé par Verner Panton, sobrement nommé Moon Lamp. Figurant parmi l’une de ses premières créations, réalisée dans les années 60, cette lampe suspendue fascine par sa complexité. Autour de l’ampoule centrale, des disques en plastique laqué blanc s’additionnent, venant enfermer la lumière avant de la diffuser sporadiquement. Une luminosité élusive qui vient rappeler la lune et la lumière qu’elle émet au cœur de la nuit, ne laissant aucun doute à la source d’inspiration de designer de l’Académie Royale des Beaux-Arts de Copenhague. Au-delà des nombreux objets présentés, Cosmos fait également la place à une installation performative, The Solitary One. Cette pièce audiovisuelle présentée dans le foyer du MUDAC associe l’image d’un trou noir aux sons spatialisés, sublimés par un violoncelliste, reliant science et art en un projet unique.

Roxane Lahidji. Planetes ©Roxane Lahidji

Terra
La seconde exposition du programme Space is the Place inverse les points de vue. Nous quittons alors la Terre d’où nous observions les cieux pour prendre de la hauteur et porter notre regard sur la planète bleue. Une planète dont l’humain semble s’être donné comme mission de changer le design. Depuis l’époque des Lumières, le désir de contrôle a pris le dessus sur le rationnel, un changement de point de vue s’accélérant au fil des siècles, de l’industrialisation à la plus récente conquête de l’espace. L’exposition Terra nous pose alors cette question : la Terre est-elle devenue un objet de design ? « Le design de notre planète s’incarne selon différents procédés : représenter le monde par la cartographie, le modeler par l’aménagement du territoire, le modéliser pour anticiper les phénomènes naturels et, aujourd’hui, l’influencer grâce notamment aux projets de géo-ingéniérie qui proposent de réagir au nouveau régime climatique par des interventions artificielles à l’échelle planétaire » expliquent les commissaires de l’exposition, Jolanthe Kugler et Scott Longfellow. Un postulat illustré par des objets, mais aussi des photographies et installations démontrant par des faits notre obsession de contrôle et d’organisation de la planète. Peut-être aussi l’illustration des erreurs passées et présentes, un rappel à la réalité à travers le design et ses objets.

Dunne and Raby ©Dirk Rose

 

 

Space is the Place
Cosmos & Terra

jusqu’au 4 février 2024
MUDAC – Plateforme 10
Pl. de la Gare 17, 1003 Lausanne
www.mudac.ch