Deux talents pour une bourse

© Jean-Marie Fahy et Pierrick Brégeon pour la Ville de Genève

Le 17 septembre dernier se tenait l’annuelle cérémonie des Bourses de la Ville de Genève. Instaurées depuis 1955, ces bourses octroyées grâce aux Fonds Berthoud, Lissignol- Chevalier et Galland (BLCG) ont pour objectif de soutenir la création contemporaine tout en permettant aux lauréats et lauréates de développer leurs projets personnels. Exceptionnellement cette année, ce n’est pas un mais deux jeunes artistes évoluant dans le domaine des arts appliqués qui ont été récompensés. La bourse a donc été scindée en deux afin de saluer et récompenser à la fois le travail de Sébastian Gross et celui de Laurence Rasti, deux artistes engagés dont le travail se rapporte à des thématiques actuelles.

SEBASTIEN GROSS

Sébastian Gross est né en 1989 à Genève. Après un Bachelor en design graphique à l’ECAL, il entreprend actuellement un Master Trans- à la HEAD. À travers son projet collaboratif Loveway, Sébastian Gross offre une performance artistique mêlant un flux vidéo et une plateforme live afin de mettre en lumière le phénomène du « broutage (arnaques en ligne) » et des importantes disparités qui existent encore entre l’Afrique et l’Oc- cident, entre le Sud et le Nord. En mettant en place un cybercafé, il réalise une performance autant visuelle que sonore dont l’objectif est de constituer un lien entre l’ici et l’ailleurs. Il invite alors le spectateur à prendre conscience du système d’exploitation et des préjugés existants afin de les déconstruire. Une belle initiative qui a inéluctablement séduit le jury.

« Venuses », Shaya sur son canapé, © Laurence Rasti

LAURENCE RASTI

Fille de parents iraniens, Laurence Rasti a grandi en Suisse. Après avoir obtenu un Bachelor en photographie à l’ECAL, elle entreprend un Master en Arts Visuels à la HEAD qu’elle termine en 2019. Partagée entre la culture iranienne de ses origines et la culture occidentale suisse, elle s’intéresse très rapidement aux codes et aux conven- tions de ces deux mondes culturels différents qu’elle connait et côtoie. À travers son travail, elle interroge l’influence des genres dans la société, comme avec son livre de photographies There Are No Homosexuals In Iran publié en 2017 et nommé par le New York Times Magazine parmi les dix meilleurs livres photo de cette même année. Avec son projet Venuses (2018-2020), elle fait dialoguer deux combats relatifs à la féminité. En re- groupant deux projets initialement distincts, Laurence Rasti met en pendant deux histoires à première vue très différentes mais qui se révèlent finalement étrangement semblables. Par la photographie, l’artiste fait dialoguer l’histoire de Shaya, une femme iranienne transsexuelle vivant en Turquie et celle de Lena, la voisine cisgenre de Laurence Rasti avec qui elle s’est liée d’amitié avant d’apprendre que celle-ci était atteinte d’un cancer du sein. À travers ses photos, elle interroge le rapport aux changements corporels tout en s’interrogeant sur la représentation de l’identité de genre et de la féminité qui ne se limitent pas à un seul prisme. Son travail met en lumière la manière dont ces deux femmes abordent personnellement leur identité et leur féminité. Un projet touchant, honnête et audacieux qui explore les questions d’identité, de genre et de beauté à travers un regard subtil et pertinent.

Exposition du 18 septembre au 11 octobre 2020 Du mardi au dimanche de 11h à 18h Centre d’Art Contemporain Genève
10 Rue des Vieux Grenadiers
1205 Genève
www.centre.ch