Contrechamps: entre éclosion et décloisonnement

L’Ensemble Contrechamps a dévoilé cet été sa sensationnelle saison 2021-2022 en conviant ses mélomanes à adopter la tenue la plus confort qu’il soit: le pyjama! Vestige du semi-confinement, ce dresse-code décloisonnera probablement la musique contemporaine trop souvent perçue comme guindé ou inaccessible. C’est en tout cas le souhait de son pétillant directeur artistique Serge Vuille qui souhaite dégommer ses idées reçues. Pour sa troisième saison à la tête de l’ensemble à géométrie variable, ce dernier nous dévoile une programmation à son image: éclectique avec entre autres un concert où Haendel croise les installations musicales en feux d’artifice de Léa Letzel, une Nuit de l’électroacoustique aux 6 Toits, nouveau centre de création aux Charmilles et des collaborations à foison à aller écouter les yeux fermés en tenue de dormeur mais éveillé! 

Face à face avec le créatif et exquis directeur artistique de l’Ensemble Contrechamps, Serge Vuille. 

Votre nouvelle saison c’est un peu une grande pyjama party…

(Rires) En fait, j’écrivais mon édito et j’ai repensé à tous ces concerts auxquels on a assisté durant le semi-confinement. Un des éléments positifs de cette expérience était le confort d’être chez soi mais surtout la tenue de rigueur: le pyjama. J’ai voulu gardé le meilleur de cette situation difficile pour notre prochaine saison. On a également appris chez Contrechamps beaucoup de chose au niveau de l’archivage vidéo. Ainsi, on s’est bien amélioré pour les enregistrements et on a décidé de créer un petit film pour nos créations afin de les diffuser. Je crois que de toute situation difficile, on en retire toujours du positive et un enseignement. Cela pousse à créer différemment et surtout à se remettre en question. J’avoue que j’étais déçu en bien par tous les éléments constructifs découlant de cette situation sanitaire (rires). 

Les interactions vous ont beaucoup manqué. Dans cette nouvelle programmation, on sent la forte envie de renouer avec le public…

J’ai parfois assisté seul à nos programmes streamés la saison passée, il n’y a aucun doute pour moi que l’expérience directe, personnelle et humaine du concert est simplement irremplaçable. L’échange est essentiel et surtout la qualité du son qui habite l’espace. C’est vraiment une priorité pour nous ainsi que mettre l’accent sur l’expérience partagée, se retrouver avec des gens en pyjama ou en habit de soirée. 

l’Ensemble Contrechamps

En parlant de partage, Contrechamps s’est toujours distingué par sa force de proposition collaborative avec divers institutions culturelles locales. Il y a en t’il plus que d’ordinaire post-confinement ? 

Effectivement, cela nous tient à coeur de créer des liens dans le tissu local. La musique contemporaine a souvent tendance à rester cloisonner dans son univers. C’est important de faire des propositions vis-à-vis du public qui est ouvert à cela ainsi que la scène artistique de la ville. C’est vraiment une priorité pour moi. Cette année nous avons notre lieu central, le Studio Ernest-Ansermet qui est en travaux. Cela a encouragé d’autant plus les partenariats pour se produire dans d’autres salles. Avec le recul, ce sont là aussi des conséquences positives suite à une situation problématique. Il me paraît très important que la musique de création que l’on propose soit intégré à une scène artistique, qu’elle puisse être accessible e à un public large et par musicologique. Notre musique est pointue et elle le restera, il s’agit juste ici de la proposer de manière ouverte et collaborative.  

Il est vrai que la musique contemporaine a toujours joui d’une réputation difficile. Comment sortir de ce cliché étriqué? 

C’est vrai mais depuis quelques années, il y a vraiment une ouverture stylistique au niveau de la musique de création. Ainsi, dans notre programme on travaille avec des artistes comme Erika Stucky (Grand Prix suisse de musique) que j’adore. Elle est complément éclectique et à l’aise dans toutes les situations. La collaboration va être très fructueuse et contre-balance des créations un peu plus complexes écrites par des compositeurs qui sortent des hautes écoles. Bien que notre spécialité soit la musique instrumentale, on a des solistes hautement virtuoses mais également flexibles puisqu’ils ont toute la technique classique ainsi que toutes les utilisations inhabituelles des instruments et aussi une ouverture vers les démarches plus improvisées. L’Ensemble Contrechamps est doté d’un groupe de musiciens très talentueux et flexible et le but pour moi c’est de mettre en valeur leur talent à travers les propositions de divers compositeur-trices.  

Contrechamps
8 rue de la Coulouvrenière, 1204 Genève
Tél. 022 329 24 00
https://contrechamps.ch