Bottega Veneta : crise identitaire

C’est un designer qui n’était encore qu’un inconnu il y a un peu plus de trois ans, et qui allait pourtant faire renaître une marque qui tombait peu à peu dans l’oubli. Daniel Lee annonçait son départ de la direction artistique de Bottega Veneta il y a quelques semaines, surprenant le monde de la mode alors que quelques jours plus tôt son dernier défilé prenant place à Détroit avait été un véritable succès. Durant ses trois années à la direction artistique, il allait imaginer des designs uniques, notamment dans le domaine des accessoires, mêlant les motifs et techniques traditionnelles de la marque italienne aux attentes de la femme d’aujourd’hui. La réussite était au rendez-vous, avec des pièces devenues emblématiques en quelques jours au point d’être encore aujourd’hui en rupture de stock. Ce départ reste un mystère non résolu, mais qui ne retire rien à l’envie de découvrir ce que Daniel Lee réserve à la sphère mode pour la suite. Retour sur ce designer à la vision unique qui a su insuffler de la vie dans une marque oubliée. 

 

Départ surprise 

À son arrivée à la direction artistique de Bottega Veneta, Daniel Lee était pour ainsi dire un inconnu. À 35 ans il avait déjà travaillé dans l’ombre de noms aujourd’hui déjà légendaires, telle que Phoebe Philo, mais jamais le devant de la scène ne lui avait été accordé. Et pourtant le groupe Kering, détenteur de la maison italienne, lui faisait confiance en le plaçant à la direction artistique de la marque. Coup de génie ? Sur le moment personne ne s’en doutait, mais les trois petites années que Daniel Lee aura passé à la tête de Bottega Veneta nous prouvent sans effort que le pari fut réussi. Le départ de Daniel Lee choque alors. Personne ne semblait l’avoir prévu, et la sphère mode semble encore, plusieurs semaines après l’annonce, avoir du mal à s’en remettre. Si le groupe a déclaré que cette séparation s’était réalisée d’un commun accord, aucune des nombreuses rumeurs qui circulent ne semble se confirmer. Mais pour certains, c’est l’annonce de la création de la maison Phoebe Philo qui l’aurait poussé à quitter le navire – est-ce mal de se réjouir de cette rumeur et d’espérer qu’elle se confirme ? En tous les cas, c’en est fini du flegme britannique dans la maison italienne. Et pourtant, pendant ces trois ans de règne, Daniel Lee a pour ainsi dire redonner vie à une marque en grand besoin de dépoussiérage. On pari volontiers que le hashtag #OldBottega devrait succéder au #OldCéline, tandis que les accessoires déjà mythiques ne tarderont sûrement pas à s’arracher à des prix exorbitants sur les sites de seconde main. 

Trois ans pour un nouveau visage

Trois courtes années auront suffi à Daniel Lee pour convaincre. Alors que Bottega Veneta était pour ainsi dire devenue une marque qu’on rayait de la liste des noms IN, le designer britannique est parvenu à conserver l’héritage emblématique tout en lui donnant un sérieux coup de fouet. Le résultat ? Des accessoires devenus tout simplement mythiques – même s’ils n’ont pas conquis tous les cœurs – mettant en valeur sous un nouveau jour le fameux tressage Bottega. Comment oublier les escarpins tressés à bouts carrés, ou encore les sacs et pochettes reprenant le motif de la maison mais à travers des designs résolument contemporains ? Le président du groupe de luxe Kering le disait lui-même à la suite à l’annonce du départ de Lee, « Sa vision singulière a permis à l’héritage de la marque de rester d’actualité et l’a replacée au centre de la sphère mode. (…) Il a écrit un chapitre unique pour Bottega Veneta ». La messe est dite. Un chapitre unique qui a convaincu les générations les plus jeunes grâce à un regard résolument neuf et des défilés toujours plus contemporains. Comment oublier également le célèbre épisode, qui restera certainement gravé dans les mémoires de mode, du vert Bottega ? Cette couleur fluo, un citron vert sous acide, est devenue emblématique pour ainsi dire du jour au lendemain. Pour le rouge Louboutin ou le bleu Tiffany il aura fallu des années, mais pour Daniel Lee un défilé aura suffi. Le succès du règne Lee se tient alors dans sa capacité à créer une nouvelle identité à la marque, et de la rendre ainsi tout simplement incontournable.

Des questions nous hantent alors. Où part-il ? Qui va donc le remplacer ? Bottega Veneta va-t-elle conserver sa nouvelle aura ? Pour une fois, personne ne semble avoir les réponses.

Daniel Lee