Baez-er d’adieu à Montreux

Joan Baez en 1961 et 2010 © DR

Indétrônable icône de la folkcontestataire, Joan Baez, 78 ans(!), parcourt une dernière fois les scènes mondialesà l’aune de son ultime tournée. Son Fare Thee Well Tourl’emmène bien entendu faire une halte au Montreux Jazz Festival, incontournable étape pour ce monstre sacré de la musique. Si sa voix a naturellement changé et n’est plus aussi modulable qu’à l’époque –raison pour laquelle la chanteuse tire sa révérence –, nul doute que ce 3 juillet, l’Auditorium Stravinski peinera à contenir toute l’émotion que susciterad’évidencela performance de cette pasionaria à l’engagement et au sourire intactsdepuis plus de soixante ans. Portrait.

Née en 1941 à New York, Joan Baez a bien vite réalisé qu’elledisposait d’un don fortrare:sa voix;nous y reviendrons. Entre deux ballottements à l’étranger et aux Etats-Unis dus au poste à l’UNESCO qu’occupe son père, la petite Joan triture du ukulélé, mais c’est un concert-révélation de Pete Seeger auquel elle assiste à l’âge de 13 ans qui la lancera sur la voie de sa destinée. Elle reprend ses chansons puis commence à se produire par-ci, par-là, avant d’acquérir sa première guitare acoustique à 17 ans –une Gibson. Désormais installée avec sa familleà Boston –alors berceau d’une scène folk en pleine ébullition –elle se fait un nom dans le milieuet le grave pour la postérité lors de sa prestation au Newport Folk Festival de 1959, suite auquel elle enregistre son premier album. S’enchaînent alors les succès, les concerts sold outet les albums, sur fond de marches pour les droits civiques des Afro-américains, contre la guerre au Vietnam et autres nobles causes au gré des injustices quele monde ne cesse de fomenter durant les décennies suivantes.

Surtout connue pour ses qualités d’interprète (de Woody Guthrie, Leonard Cohen, Stevie Wonder, Pete Seeger, des Beatles, des Stones, …), Joan Baez participe à faire de Bob Dylan une star en reprenant ses morceaux. Et pour cause, sa voix cristalline de soprano, capable de toutes les modulations et d’accrocher les aigus avec intensité sans jamais heurter les oreilles, souligne à merveille les textes poétiques et engagés de celui qui fut aussi l’un de ses grands amours. Une relation qui inspirera par ailleurs à Joan Baez l’une des plus belles chansons qu’elle ait écrite, Diamonds and rust. Si l’amour la guide dans ses textes et dans le choix de ses interprétations, c’est avant tout le militantisme qui l’anime. Pacifiste jusqu’à la moelle, la «Reine de la folk» chante depuis soixante ans contre toutes les formes d’oppression: racisme (qu’elle a elle-même subi en raison de ses origines mexicaines), homophobie, guerres, atteintes contre l’environnement, etc. De la lutte pour les droits civiques à Occupy Wall Street, en passant par des sit-in dans des arbres menacés, elle donne de sa voix et de sa personne pour tous les combats, jusqu’à trasher Donald Trump dans son bien-nommé morceau Nasty Man posté sur YouTube en 2017. Alors, pour toutes ces inoubliables chansons et émotions, pour cette énergie sans faille dévolue à la résistance, merci et farewellJoan, vous êtes un exemple qu’il est plus que jamais nécessaire de suivre.

Joan Baez
Fare Thee Well Tour
Le 3 juillet
Montreux Jazz Festival 
Auditorium Stravinski www.montreuxjazzfestival.com