13EME ART MUSIC: UN LABEL MARSEILLAIS A VOCATION SOCIALE

Au commencement, il y eu l’info l’année dernière qu’un Festival gratuit de culture urbaine appelé le Castellival [Le Festival se déroule pendant trois jours dans le quartier de La Castellane, NDR] se tenait en juillet à Marseille…hélas, aucun moyen d’y assister, les dates de mon séjour dans la cité phocéenne tombaient à côté. Cette année, alors que j’essayais de caler mes vacances sur la période du Castellival, j’apprenais que le label 13ème Art Music soutenait l’événement. Malheureusement, rebelote. Manu Daher, chargé de projet social au sein du label, me confirmait que le Festival était annulé pour une raison que tout le monde connaît. Voilà pour la petite histoire…Le point positif dans tout ça, c’est que Manu était disponible pour une interview. Ni une, ni deux : Au lieu d’écouter du rap marseillais en live, j’irai écouter dans les bureaux du label un ancien éducateur du quartier pour qui les projets ne se limitent pas à la musique. A lire avec l’accent marseillais!

En plus de la musique à proprement parler, j’ai lu que le label avait également une portée sociale. Pourriez-vous revenir sur cet aspect du label?

A la base je n’ai pas commencé dans la musique. J’ai grandi à la Castellane, c’était moi l’éducateur jeunesse là-bas. J’ai commencé à 17 ans, animateur BAFA. D’années en années, j’ai pris des responsabilités: le pôle jeunesse et puis le pôle jeunesse adulte. Comme je suis attaché au quartier, j’ai eu envie de faire des choses pour les jeunes, voilà comment j’ai intégré 13ème Art Music. Parce que dans le label, les trois-quarts sont issus de la Castellane et ça me tenait à cœur de leur faire plaisir. 

Au sujet du Castellival, j’ai l’impression que peu de médias locaux en parlent. Est-ce lié à la situation des Quartiers Nords, un secteur un peu oublié?

Non concernant le Festival, c’est un choix, on ne voulait pas trop communiquer non plus. Il faut gérer aussi le flux de personnes le soir des concerts. Ils sont gratuits, il y a des têtes d’affiche. S’il y a trop de monde, c’est ingérable. Ça peut devenir dangereux s’il y a un mouvement de foule par exemple. L’aspect sécuritaire, c’est le principal. L’année dernière, il y a eu 12’000 personnes sur les trois jours. A la base dans le quartier, il y a plus de 5’000 habitants. Alors tout le monde ne  va pas venir, mais il faut compter sur les gens extérieurs. Il y en a qui venaient de Toulouse, de Toulon, de Nice, tout le Sud. Mais pour revenir aux médias, c’est vrai que j’ai beaucoup travaillé à la Castellane, j’ai fait des grosses actions et il n’y en avait pas un qui venait. Par contre, si il y a une voiture volée, ils sont là. Tu vois un peu la gamberge? A Marseille les médias aiment bien appuyer sur le côté gangster, kalash. Alors que c’est comme dans toutes les grandes villes. Et à force de dire aux gens que tu es le vilain petit canard, tu commences à le penser. Une fois, j’avais créé un championnat de foot à la Castellane avec les fédérations et tout, j’étais content. J’ai fait venir un journaliste qui a vu les petits s’entraîner, il assisté au truc. Le lendemain, qu’est-ce qu’il écrit dans le journal ? : « Entre kalashs et ballons ». J’ai pété une durite. Si il y avait eu ne serait-ce qu’une petite bagarre lors du Castellival l’année dernière, ça serait ressorti. 

Et le bilan de la dernière édition du coup?

Nickel. Aucun problème, au contraire. La première journée, appelée « Kstekermesse » était dédiée aux enfants, c’est comme une kermesse: il y avait des châteaux gonflables, des stands de pêche à la ligne, des goûters pour les petits, des box de bonbons à offrir aux enfants. Ensuite il y a la deuxième journée, intitulée « Kste Family », organisée avec les mamans et les jeunes: c’est un grand repas avec la mise en avant des associations sportives, culturelles. Il y avait des démos de sport, des défilés de mode. Surtout le plus beau, c’était le bal de promo, ça c’est mon bébé: je récompense tous les diplômés de la Castellane. On les habille un peu à l’américaine avec les chapeaux, en bleu, blanc et rouge. On fait en sorte que ça représente une action citoyenne, on est tous français. En plus c’est tombé sur la journée où il y avait la finale de la Coupe d’Afrique des Nations Algérie-Sénégal. Retransmission en direct avec un repas et plus de mille couverts. C’était  vraiment quelque chose. Après je te montre des vidéos [Effectivement, une grosse organisation pour un évènement festif et convivial. Pour les genevois/es, imaginez le parc des bastions un jour de fête de la musique, NDLR]. Et le dernier soir, il y a les « Ksteconcerts » dont je parlais avant. Pour moi le plus important, ce sont les deux premiers jours. C’est pour faire plaisir à tout le monde des plus petits jusqu’aux séniors. Dans beaucoup de quartiers en France la situation se dégrade, donc ça fait plaisir de ramener des sourires, ça fait du bien et on en a besoin. Et on donne de la lumière aux autres, « Venez-vous mettre en avant ! ». Les petits créateurs d’habits de la Casté’, faites votre défilé de mode, les petits chanteurs, lancez-vous aussi. Tout ce que l’on peut mettre en avant, on le met en avant. Après mon rêve serait que le Castellival devienne LE festival de culture urbaine à Marseille. Des ateliers graffs d’un côté, des battles par-ci, des défilés de mode, des concerts…

Y-a-t-il d’autres projets qui gravitent autour du Castellival?

Oui, ça ne se termine pas comme ça. Il y a les trois jours de fête plus des sorties. En partenariat avec la mairie, on fait une sortie avec les mamans pour les remercier. Et ensuite, une sortie pour les jeunes. J’ai ramené cent vingt jeunes à Aqualand l’année passée. En fait, il y a toute une dynamique sur presque six mois. Il y a l’avant où on prépare avec les jeunes, il y a les trois jours et après on remercie les gens. C’est bien que les gens s’investissent mais c’est bien aussi qu’on les remercie. C’est un bon concept. C’est pour ça que je suis venu à 13ème Art. C’est pour développer cette partie sociale. 

Et par rapport à la musique du coup, vous vous occupez de quelque chose ou de quelqu’un en particulier?

Je suis chargé du projet de Bayssou, je l’accompagne. Il a besoin d’être entouré : « Occupe-toi de ta musique, nous on gère le reste ». Gérer les réseaux sociaux, faire de la promo. Je suis aussi un peu garant de l’organisation générale du label: quels sont les objectifs ? Si on doit recruter un petit, se séparer d’un autre, se lancer dans l’organisation de concerts. On va faire une boutade, mais je suis un peu un couteau suisse [Rires].

Site et réseaux du label :

https://13emeart.com/

https://www.youtube.com/channel/UCK8EZls0Sf0TZx7g9qCpATQ

https://www.facebook.com/13emeArtMusic13