Une vie entière sur les lèvres
« On ne badine pas avec l’amour » de Jean Liermier
© Carole Parodi
C’est quoi, aimer ? C’est quoi s’engager ? Quelque chose à vivre, assurément ! Ces interrogations existentielles sont omniprésentes dans « On ne badine pas avec l’amour » d’Alfred de Musset. En 2023, ces questionnements nous tourmentent toujours. Mais face à une époque où les sites de rencontres, le romantisme hollywoodien et les questions de genres sont de mise, on réfléchit d’une tout autre manière. Pour cela, Jean Liermier rebat les cartes écrites par le poète français et dépose les masques au Théâtre de Carouge jusqu’au 26 mars prochain.
« J’ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j’ai aimé. C’est moi qui ai vécu, et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui ». Cette célèbre réplique du dramaturge français Alfred De Musset traverse encore les esprits aujourd’hui. Romantique et passionnée, On ne badine pas avec l’amour confronte trois adolescents Perdican (Cyril Metzger), Camille (Adeline d’Hermy de la Comédie-Française) et Rosette (Nastassja Tanner), perdus au pays de leur enfance. L’intrigue ? L’action commence au retour de Camille de son couvent où elle a passé 10 ans de sa vie. Elle et son cousin Perdican se retrouvent au château du Baron, où ils ont grandi et se sont aimés. Le Baron projette alors de les marier. Éduquée auprès de sœurs religieuses, malheureuses en amour, la jeune femme est persuadée qu’il est dangereux d’aimer. Elle refuse catégoriquement cette union. Par orgueil, Perdican, touché par ce refus, séduit Rosette, une paysanne, afin de rendre jalouse Camille…
Un drame romantique contemporain
On ne peut cesser d’aimer, on ne peut jouer avec l’amour sans se brûler les ailes et regretter cet amour qui nous rend vivants. Les protagonistes vont bien s’en rendre compte. Dans cette représentation signée Jean Liermier, Perdican, Camille et Rosette affirment jusqu’au bout leurs sentiments, comme on s’exerce au combat sans conscience de la force meurtrière des mots. Ce drame romantique de Musset revient sur la scène du Théâtre de Carouge, emballé de mélancolie. Portée par la finesse et la contemporanéité, la mise en scène de Jean Liermier enchante le plateau. Huit comédiennes et comédiens (Simon Aeschimann, Gaspard Boesch, Adeline d’Hermy de la Comédie-Française, Cyril Metzger, Frank Semelet, Nastassja Tanner, Christine Vouilloz, Roland Vouilloz) éblouissent par la qualité de leur jeu. Un spectacle émouvant qui place l’amour comme créateur et moteur de la vie. Au terme de sa vie, on ne retient que l’amour et sans lui, on ne peut vivre. La mort de Rosette en témoigne à la fin.
Au cœur d’un univers plutôt sombre et désenchanté, cette pièce met en lumière les rages, les questionnements d’une adolescence tiraillée par l’hypocrisie du monde adulte. En alliant le grotesque et le sublime à sa manière, Jean Liermier invite les spectateurs à reconsidérer la place de l’amour dans la vie d’un individu. La trame délicate et sensuelle de la comédie invite le drame à s’introduire progressivement. On le sent monter lentement jusqu’à qu’il éclate brusquement. Une représentation qui pourra vous faire rire, frémir, pleurer… Ou tout simplement vivre !
» On ne badine pas avec l’amour »
Jusqu’au 26 mars
Théâtre de Carouge
Rue Ancienne 37A
1227 Carouge
theatredecarouge.ch