Un vent de surréalisme souffle sur le MUDAC
Le MUDAC de Lausanne vient tout juste d’inaugurer ses deux nouvelles expositions, s’articulant autour de la célébration des 100 ans du manifeste surréaliste. Une nouvelle saison en diptyque, où art verrier, mobilier, et objets en tous genres cohabitent dans un univers où le rêve, l’irrationnel et l’imaginaire se bousculent et se métamorphosent. Objets de Désir nous vient tout droit du Vitra Design Museum. Une exposition où le dialogue est ouvert entre influences surréalistes et design, du début de ce mouvement à nos jours. Alchimie nous entraîne de son côté dans un voyage à travers l’imposante collection d’art verrier du musée lausannois. Encore une fois ici, c’est la thématique surréaliste qui articule l’installation, dans une scénographie où la matière et sa transformation se placent au cœur de tout. Immersion dans un univers de rêve et de fantaisie.
Alchimie, fusion des matières
En pénétrant dans la première salle du MUDAC, il nous semble atterrir dans l’atelier d’un maître verrier fou. Des montagnes de sable jonchent le sol, le bruit de l’eau s’écoulant sur une fontaine de métal nous berce. Au centre de cette installation signée par le studio genevois GALTA, un volcan, symbole du four de l’artisan, autour duquel s’articulent des railles et des étagères de métal. Un atelier fantasmé en quelque sorte, qui s’inspire directement d’un projet porté par le maître verrier vénitien Edigio Costantini. Actif à Murano, il décide un jour de faire évoluer le verre dans une nouvelle direction, et dans les années 1950 entre en contact avec une myriade d’artistes européens, parmi lesquels on compte Max Ernst, Jean Cocteau, Marc Chagall, Salvador Dali… Son projet ? Leur demander de dessiner des croquis, auxquels il donne ensuite vie par le travail du verre. Un projet ambitieux qui prend place dans la Forge des Anges, son atelier ainsi baptisé par Jean Cocteau.
Dans l’installation du MUDAC, nous découvrons alors une sélection de ces créations, faisant partie de la collection du musée lausannois, possédant la plus grande quantité d’objets verriers d’Europe. S’exposent alors des créations faites de la main d’Edigio Costantini, à l’image d’une horloge dégoulinante dessinée par Salvador Dali, d’une création abstraite pensée par Picasso, mais aussi des créations contemporaines, rappelant l’influence que la période surréaliste continue d’imposer aux artistes de notre époque. Un échappatoire au réel qui invite les visiteurs d’Alchimie à quitter l’univers du rationnel pour se plonger dans un monde dominé par le rêve et la fantaisie.
Objets de désir, le Vitra à Lausanne
Née au Vitra Design Museum, le deuxième volet de ce diptyque, intitulé Objets de désir, constitue la dernière exposition imaginée par le directeur du musée emblématique, Mateo Kries, avant la pandémie. Un projet qui prend source à Weil-am-Rhein, avant de voyager, et d’atterrir à Lausanne pour le centième anniversaire du manifeste surréaliste, et sa dernière présentation au public. « L’idée de cette exposition résidait dans le désir d’étudier les liens entre l’art du 20ème siècle, et le design d’hier et d’aujourd’hui. Un dialogue était existant, mais n’avait jamais été étudié alors que l’influence du surréalisme dans la production du design était évidente. Tout à coup, la question de l’utilitaire n’était plus la seule au centre de la production d’objets. L’influence du surréalisme a fait naître l’idée d’un paradigme nouveau, celui d’un design transcendant l’utile. Les designers ont alors à leur tour désiré exprimer un inconscient, des rêves, des peurs, des émotions, à travers leurs créations. Objets de désir a pour vocation de mettre en avant ces liens qui unissent le surréalisme et la production d’objets, et la libération que ce courant artistique a permis d’insuffler au monde du design » expliquait Mateo Kries lors de son introduction, devant une toile de Dali reproduite à une échelle monumentale.
Objets de désir nous entraîne alors dans un voyage chronologique, partant des origines du mouvement surréaliste et de ses premières influences sur l’univers du design pour aboutir à des créations contemporaines, qui continuent encore aujourd’hui de porter en elles cette idée de rêve, de fantasme, d’un design qui transcende la fonction pour venir interroger notre monde et ses codes. Des toiles agrandies de Dali viennent parer les murs de l’espace d’exposition envahi d’objets en tous genres. Nous retrouvons des pièces emblématiques, à l’image du sofa Bocca qui se fait sans aucun doute pièce de résistance de l’exposition, au milieu de dizaines d’autres objets, alliant mobilier, mode, photographies, ou encore graphisme. Mateo Kries d’ajouter, « Cette exposition vient démontrer l’importance que le surréalisme a joué pendant des décennies dans le monde du design, chez des créateurs tels que Noguchi, Ray Eames, ou encore Le Corbusier, et l’influence qu’il continue d’exercer sur la création contemporaine. Le surréalisme fait de l’objet plus qu’un simple objet.”
Alchimie & Objets de Désir
Jusqu’au 4 août 2024
MUDAC – Plateforme 10
Place de la Gare 17 – 1003 Lausanne
www.mudac.ch