TRAVERSÉE CORPORELLE ET POÉTIQUE

Les interprètes de Vagabundus d’Idio Chichava, en pleine transe chorégraphique — entre tension et abandon, tradition et modernité — sur la scène où chaque corps devient mémoire vivante (c) Mariano Silva

Treize corps. Treize vies. Treize histoires portées sur scène. Du 10 au 12 octobre, le Pavillon ADC à Genève accueille Vagabundus, une création d’Idio Chichava. un voyage sensoriel au cœur de la mémoire, du lien et de la migration. Une expérience à vivre, à respirer, à ressentir. Coup de projecteur.

Une chorégraphie entre tradition et modernité
Dans Vagabundus, Idio Chichava tisse un fil invisible entre tradition et modernité. Les danses rituelles des Makondé, peuple du Mozambique, se mêlent aux mouvements contemporains. Le plateau devient un espace de rencontre où l’ancien dialogue avec le présent, où chaque geste devient langage. Les treize interprètes apportent avec eux des objets personnels, souvenirs silencieux d’un ailleurs, qui deviennent autant de symboles de mémoire et de migration.

La chorégraphie déconstruit puis reconstruit les gestes du quotidien, transformant le plateau en un espace brut, où chaque saut, chaque chute, chaque étirement est une narration silencieuse. Les corps sont nus, mais cette nudité n’est jamais gratuite : elle est fragile et imposante à la fois, révélant la vulnérabilité humaine tout en affirmant une force intérieure. L’émotion prime sur la technique : chaque mouvement devient parole, chaque geste devient récit.

Le chant comme souffle et mémoire
La musique occupe une place centrale dans Vagabundus. Le chant, parfois solo, parfois en chœur, accompagne les mouvements et devient souffle, mémoire et lien. Les sonorités, inspirées des chants traditionnels du Mozambique, oscillent entre gospel, musiques baroque et contemporaines, créant une atmosphère à la fois intime et universelle. Le plateau, dépourvu de décor, de costumes élaborés ou d’artifices techniques, met en lumière la puissance de la simplicité et de l’authenticité.

Une expérience immersive et sensorielle
Vagabundus ne se contente pas d’être vu : il se respire, se ressent, se vit. Le spectateur est invité à entrer dans un espace où le temps semble suspendu, où chaque mouvement, chaque souffle et chaque silence tissent une trame émotionnelle puissante. L’expérience devient presque méditative, un espace où l’on se reconnecte à la mémoire collective, aux histoires de migration et aux liens invisibles qui nous unissent.

La lumière, sobre et incisive, souligne la beauté brute des corps et accentue l’intensité dramatique des performances. Aucun artifice n’interfère avec l’essence même du spectacle : il s’agit d’un corps à corps avec l’émotion, d’un dialogue entre les interprètes et le public qui résonne longtemps après la dernière note et le dernier geste.

Idio Chichava 

Vagabundus

ve 10 — di 12 octobre

https://pavillon-adc.ch