SONGES BAROQUES D’UN ARTISTE CONTEMPORAIN

Roberto Ferri, I Cavalieri dell’Apocalisse, huile sur toile, 205 x 305 cm, 2011. © Robertoferri.net

À première vue, on daterait aisément des siècles passés la plupart des œuvres produites par Roberto Ferri. Il faut dire qu’aujourd’hui presque aucun artiste ne développe une peinture académique s’inspirant des anciens courants artistiques tels que le baroque, le romantisme et le symbolisme, et pourtant ! Au milieu du paysage contemporain, les œuvres spirituelles de Roberto Ferri font figure d’exceptions. Maîtrisant à la perfection le disegno et le coloris des artistes de l’époque, le peintre réalise des œuvres où se mêlent christianisme et ésotérisme dans une atmosphère à la fois inquiétante et érotique. Un art atemporel à la croisée des mondes, entre tradition et innovation.

Né à Tarente dans les Pouilles en 1978, Roberto Ferri commence sa formation artistique en étudiant à l’école d’art locale. Autodidacte, il s’exerce à la peinture puis, comme l’exige toute formation classique, il quitte sa ville natale en 1999 pour s’installer à Rome et approfondir sa formation artistique. Là-bas, il élargit ses connaissances sur la peinture ancienne et montre un intérêt particulier pour les œuvres produites entre le XVIe et le XIXe siècle. Il développe alors son style en s’inspirant des artistes notables de la peinture baroque italienne comme le Caravage, mais aussi des peintres français plus tardifs tels que David, Géricault et Moreau. En 2003, son travail est présenté à Rome lors de sa première exposition personnelle au Centre d’art contemporain Luigi Montani di Genzano. Trois ans plus tard, sa parfaite maîtrise de la peinture lui permet d’être diplômé avec les honneurs de l’Académie des Beaux-Arts à Rome. 

Roberto Ferri, Il canto della Vergine, huile sur toile, 100 x 140 cm, 2015. © Robertoferri.net

Une peinture audacieuse

Assimilant avec une aisance déroutante les techniques artistiques des grands noms de la peinture, le peintre propose un art qui rompt avec les codes contemporains pour s’inscrire dans la continuité des artistes classiques. Caractérisé par des capacités techniques et artistiques irréprochables, Roberto Ferri explore au travers de ses œuvres les tribulations de l’âme et du corps qui oscillent perpétuellement entre ombre et lumière, déchéance et spiritualité, sacré et profane. Ses compositions se forment telles des visions de l’esprit inspirées par des songes métaphoriques et mélancoliques. Au milieu de ce panorama classique, Roberto Ferri ajoute une touche surréaliste qui rappelle au spectateur qu’il s’agit d’une œuvre moderne. Le traitement des sujets se distingue des conventions passées, l’ambiance mêlant morbidité et érotisme est provocante, l’artiste ose bien plus que ses prédécesseurs. Mélangeant subtilement les genres et les époques, il réinterprète des sujets mythologiques et bibliques avec un regard moderne. Certaines œuvres se réfèrent explicitement à des peintures connues, ainsi le Baiser (2015) fait référence à la célèbre peinture du même nom de Francesca Hayez ; le Chant de la Vierge (2015) reprend la Naissance de Vénus d’Alexandre Cabanel alors que les Cavaliers de l’Apocalypse (2011) rappellent les œuvres surréalistes de Salvador Dali. 

Fasciné par le conflit intérieur entre le bien et le mal, il cherche à représenter les tourments de l’âme qui s’expriment à travers les tensions corporelles. Dans ses œuvres, le mal se traduit par une déformation physique qui n’est en réalité que le reflet de la déformation de l’âme. Ces transformations métaphoriques revêtent des aspects inquiétants parfois bestiaux alors que le bien se manifeste par des formes plus harmonieuses. Parmi les créatures fantasmagoriques tout droit sorties de son esprit, des anges mais aussi des centaures, féminins et masculins, éminemment érotiques et ésotériques. Grâce à ses sujets spirituels foncièrement symboliques et à sa technique irréprochable, le travail de Roberto Ferri tend vers le sublime, la puissance de son pinceau capture avec justesse la beauté de la condition humaine. 

Roberto Ferri, Pape François, huile sur toile, 200 x 110 cm, 2014. © Robertoferri.net

Art sacré 

À la manière des peintres qu’il admire tant, Roberto Ferri réalise également des tableaux religieux représentant le plus souvent des scènes de la Passion du Christ, mélangeant subtilement souffrance et grâce. En 2014, le Saint-Siège fait d’ailleurs appel à lui pour réaliser deux portraits officiels de l’actuel pape François Ier. Comble de la reconnaissance pour un artiste admirant la peinture ancienne religieuse, ces deux œuvres sont à présent exposées au Vatican, côtoyant les plus grands noms de l’histoire de l’art. 

Roberto Ferri s’impose donc dans le panorama artistique contemporain comme un artiste atypique, presque anachronique, qui s’affranchit des codes actuels du monde de l’art pour louer à travers une poésie picturale onirique, presque cauchemardesque, un art ancien fantasmé et divinisé. 

http://www.robertoferri.net