Rubis sur l’ongle

La nail artist, Mei Kawajiri

Les ongles extravagants reviennent en force. Longtemps considérés comme kitsch ou à la limite du puéril, les voici désormais cool et désirables. La tendance doit son retour à une personne en particulier : la très prisée nail artist Mei Kawajiri.

Si les années 2010 prônaient les manucures minimalistes, les années 2020 prennent le tournant de l’extrême. C’est officiel, la maxime du « Less is More » n’a plus sa place dans l’univers de la beauté contemporaine. Désormais, les ongles sont un nouveau terrain de jeu où toutes les excentricités sont permises. La cause : les nail artists, qui transforment chaque manucure en véritables petites œuvres d’art. Parmi les pionnières de ce mouvement, Mei Kawajiri, qui s’occupe des mains des plus grandes célébrités – tant dans leur vie privée que sur les podiums de la Fashion Week.

 

Double culture inspirée
Originaire du Japon et expatriée à l’orée de ses vingt ans à New York, Mei Kawajiri a baigné dans le berceau du mouvement kawaii avant d’être confrontée à la street culture américaine. De ces deux univers, elle a su créer le sien. On obtient ainsi un métissage singulier et pointu, issu d’une palette d’inspirations mêlant humour, régression, couleurs pop, ou encore styles cyberpunk et néo futuriste. Si ce mix peut sembler incongru de prime abord, il séduit pourtant rapidement les plus hauts noms de la mode. Marc Jacobs, Dua Lipa, Ariana Grande, les sœurs Hadid, Cardi B… Tous ont été vus parés de griffes plus audacieuses les unes que les autres – comprenant strass, diamants, chaînes et autres décors en reliefs 3D.

Puissance virale

Soutenue à ses débuts par Carine Roitfeld, ex rédactrice en chef du Vogue Paris et initiatrice du controversé « porno chic », c’est pour le magazine CR Fashion Book que Mei Kawajiri réalise sa première série de manucures à succès. Approuvée par l’une des plus avant-gardistes et influentes reines de style que l’on connaît à ce jour, la jeune Mei se voit rapidement propulsée au rang de star elle-même. D’une simple parution, ses ongles sont devenus prisés de toutes parts. Tous les membres de la Haute Société Mode succombent à ses designs tantôt hors du commun, tantôt précieux : passant d’une douce Lily-Rose Depp à une excentrique Lotta Volkova. Aujourd’hui, la nail artist polymorphe compte plus de 333k de fidèles abonnés sur Instagram, et ne cesse de gagner en notoriété chaque jour.

Marqueur social
La manucure pourrait paraître un détail dérisoire, voire futile, de chaque mise en beauté. Or, son importance n’est pas à prendre à la légère. La décoration ongulaire prend ses sources il y a des millénaires. Déjà dans l’Antiquité, elle était utilisée à des fins sociales, spirituelles ou religieuses. Chez les Incas, on y représentait des animaux sacrés afin d’honorer les dieux. Chez les Babyloniens, les ongles étaient teints au henné comme signe de statut social, tandis qu’en Chine les femmes nobles se distinguaient en arborant des mains ornées de luxueux décors d’or et d’argent, de noir et de rouge. Puis, dans l’aristocratie orientale comme occidentale antérieure, plus les ongles étaient longs, plus le rang occupé dans la société était haut — prouvant que l’on possédait tant qu’il était inutile de travailler et de mettre la « main à la pâte ». Si cette fonction a peu à peu perdu de sa valeur, aujourd’hui la manucure demeure malgré tout un vecteur d’appartenance. La coquetterie n’est certes plus réservée à une poignée de privilégiés, mais sa conception en dit long quant à l’identité de chaque individu. D’un nail art goth quasi outrancier à des griffes néons, psychédéliques, ou au contraire pastels à souhait : aujourd’hui, chacun est libre de s’exprimer et de laisser s’épancher sa personnalité.

 

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