Othmane Khoris : étoile filante gourmande

Le chef pâtissier Othmane Khoris, sacré meilleur pâtissier du pays 2023 par Gault et Millau

De Dubaï chez One and Only the Palm de Yannik Alleno, au Dreams Hotel de Punta Cana (République Dominicaine), à Kongsberg (Norvège) au Restaurant Skragata, au Hilton aux Emirats Arabes Unis, puis au Ritz-Carlton aux Îles Caïmans avec Eric Ripert, le chef pâtissier Othmane Khoris détonne par son parcours international. En 2021, après avoir parcouru le monde, cet astre solaire toujours tout sourire, pose spatules et talent à l’Alpina Gstaad pour gérer les desserts des 4 restaurants : le Megu, le Sommet, le Swiss Stübli, le Chalet du Jardin. Il y décline des desserts de haute voltige, faibles en sucre et forts en goût. Normal qu’à 27 ans, il soit sacré meilleur pâtissier du pays 2023 par Gault et Millau! 

Rencontre avec un génie de la pâtisserie aux créations aériennes flirtant entre minimalisme onctueux et philosophie du zéro déchet. 

 

Comment avez-vous embrassé cette carrière de pâtissier? D’où provient cette passion?
Ma grand-mère avait une boulangerie-pâtisserie et mon père l’a reprise. À 4-5 ans, par curiosité, je rentrais dans le laboratoire pour guigner et voir ce qu’il s’y tramait. J’ai toujours aimé cela. J’ai le sentiment d’avoir toujours cuisiné. Cela fait partie de mon ADN.

De votre expérience internationale qu’avez-vous embarqué dans vos recettes?
De ma formation chez Stohrer (la plus ancienne confiserie de France) à Paris, j’ai embarqué avec moi le Baba au rhum, leur spécialité. Je l’ai adapté en fonction des pays où j’officiais. Ce qui est intéressant, c’est qu’on garde sa base puis on l’associe aux ingrédients locaux. Ainsi, à Dubaï, il était aux dattes. Malheureusement, le Baba ne figure plus sur la carte au restaurant à l’Alpina Gstaad.

Fondant au chocolat: chocolat Maracaibo ٠ mousse ٠ glace au café ©DR

L’Alpina Gstaad promeut une cuisine autour du zéro déchet. Est-ce que vous aviez déjà cet état d’esprit dans votre cuisine avant d’y travailler?
Pour être honnête, avant d’arriver ici, je ne suivais pas du tout cette philosophie, j’étais même à l’opposé de cette vision de la cuisine. Il faut savoir que lorsque vous travaillez à l’international comme à Dubaï, l’approche est différente. Ce n’est pas comme en Europe où on accède plus aisément à ceux qu’on veut. Déjà, à Dubaï, il y a très peu de produits locaux. On y importe quasi tout. On commande de Ringis en France, du Tsukiji Market à Tokyo et de partout dans le monde. D’ailleurs, j’avais vraiment pris l’habitude de commander les produits les plus exclusifs sans limite. En arrivant à l’Alpina Gstaad, j’ai vraiment dû m’adapter et apprendre à intégrer ces valeurs. Cela m’a pris du temps mais je suis très heureux de penser différemment aujourd’hui et d’avoir développé cette conscience écologique. Depuis que je suis ici, j’ai également renoncé à travailler avec du sucre blanc. Je me suis imprégné de l’état d’esprit de l’hôtel auquel j’adhère!

Et comment intégrez-vous la philosophie du zéro déchet dans vos créations?
Tous les desserts partent de cette philosophie. Il faut admettre que le 100% n’est pas encore totalement réalisé mais les 80% de nos desserts sont créés à partir de cette idée où l’on cuisine à partir de tous les ingrédients usés. C’est le cas par exemple du dessert Chestnut. En hiver, en Europe, on consomme beaucoup de châtaignes. Dans cette création, on va utiliser la coque, le fruit avec lequel on va réaliser une crème, une pâte, des tuiles. On ne jette absolument rien de la châtaigne.

D’où proviennent vos inspirations ?
Je regarde par la fenêtre (rires)! Venez visiter la cuisine vous comprendrez. À l’Alpina Gstaad, on a la chance de travailler dans un cadre idyllique. La cuisine est dotée d’une grande baie vitrée à travers laquelle on voit les Alpes et les sapins. La nature est ma muse.

 The Yuzu: sorbet au yuzu ٠ perles de yuzu ٠ confit ٠ gelée de Sudachi ©DR

Et selon vous, qu’est-ce qu’un dessert réussi?
Si c’est moi qui le cuisine, c’est un dessert qui plaira à un maximum de gens! J’aime parler à tout le monde. Sinon pour moi, rien ne rivalise avec la tarte aux pommes de Stéphane Glacier. Gourmande, généreuse, tu t’en rappelles toute ta vie! Elle est exceptionnelle. Il ne la propose que le week-end et je recommande vivement d’appeler pour la commander. Quand je mange un dessert, je veux me régaler. L’aspect healthy, je ne le considère pas (rires)!

Vous êtes sacré chef pâtissier de l’année par le Gault-Millau. Un ressenti?
C’est vraiment une fierté! J’ai toujours été entouré de gens couverts de prix et j’en rêvais aussi. Cela a pris 10 ans mais c’est arrivé! Je dois aussi cette récompense à l’Alpina Gstaad. C’est le meilleur établissement et management avec lequel j’ai collaboré. On t’accorde une confiance qui te permet de voler de tes propres ailes et cela contribue à ton développement personnel et professionnel. Pour moi, on a eu le titre ensemble. Ici, le management est très ouvert et à l’écoute. C’est très précieux. Je n’avais jamais vécu d’expérience similaire avant: du simple au commis au chef exécutif, tout le monde est heureux d’être ici et tu le ressens. Personnellement, je n’ai même pas le sentiment de travailler. Je viens pratiquer une passion, entouré de gens extraordinaires dans les meilleures conditions de travail que je n’aurais pu rêver d’avoir. Mention spéciale à Martin Göschel que je considère comme un grand frère bienveillant et au directeur de l’hôtel Tim Weiland, très ouvert d’esprit et sympa, il ouvre les portes en poussant à l’innovation. Je le trouve très attentif à l’équipe.

Le prochain challenge à relever ?
Ce serait l’ouverture d’une pâtisserie en Suisse idéalement puis le MOF (Meilleur Ouvrier de France) d’ici 5 ans.

 

Chef Othmane Khoris à l’Alpina Gstaad
Alpinastrasse 23, 3780 Gstaad
www.thealpinagstaad.ch