Merveilleux mycelium

©Amen, la marque de bougies françaises qui révolutionne l’emballage

Et si l’avenir de notre planète ne tenait qu’aux champignons ? Pardonnez-nous, le raccourci est peut-être légèrement exagéré. Mais gare à celui qui sous-estimera le mycelium, la base de tout champignon, qui nous fait des promesses d’avenir des plus convaincantes. Ecolo par nature, il fait partie depuis toujours de notre éco-système, et parmi les têtes pensantes du monde du design et de la science, certaines ont pensé à exploiter cette partie du champignon sur laquelle personne ne semblait vraiment s’attarder. Si certains n’ont peur de rien et vont jusqu’à créer des cercueils dans cette matière biodégradable, d’autres s’en servent pour des tâches plus usuelles et quotidiennes, mais souvent terriblement polluantes. Après les pâtes aux morilles, les omelettes aux chanterelles, et les champignons qui nous font voir des éléphants roses, place au mycelium, futur premier rôle dans le monde de la mode et du commerce. Cueillette oblige, on vous emmène en balade.

Révolution écolo à l’ombre des forêts (et des labos)

Commençons par une définition. Qu’est-ce que le mycelium ? Derrière ce mot d’apparence à la fois complexe et légèrement poétique se cache la partie végétative du champignon. Constituée de filaments blancs ramifiés sous la terre, ils servent de base à la pousse des champignons, que l’on peut aussi appeler carpophores, rien que pour étaler notre culture générale. À l’heure où changer notre mode de vie et de consommation n’est plus devenu un choix, mais une urgence, les cerveaux aiguisés se sont mis en quête d’un matériau qui viendrait littéralement nous sauver la vie. Et tel un super-héros que personne n’avait remarqué, le mycelium est arrivé. Il ne porte peut-être pas de cape, sait se faire discret, et sommeille sous terre, mais avec son bilan carbone qui frôle le zéro, sa facilité de production, et son caractère éthique plus qu’exemplaire, il est clairement la star de demain. Les défenseurs de la nature n’ont pas de souci à se faire, personne n’ira saccager les forêts pour récupérer les précieux champignons aux racines d’or. La production du mycelium en laboratoire résulte en réalité presque du jeu d’enfant. Les cellules de mycelium sont déposées sur des petits matelas, puis nourries avec différents types de nutriments nécessaires à leur croissance, ce dans un environnement humide à la température stable. Deux semaines plus tard, en lieu et place des cellules invisibles, apparait un nuage digne d’un marshmallow, le mycelium. Il ne suffit plus qu’à le récupérer et de le transformer selon le désir du créateur. La seule question qui nous vient en tête en découvrant ce processus d’une simplicité et d’une éco-responsabilité effarantes est, pourquoi seulement maintenant ? Nous n’avons pas la réponse, mais dans les racines des champignons, si nous ne pouvons pas comprendre le passé, il semble désormais possible de lire l’avenir.

Le cuir à base de mycelium baptisé ©Mylo, créé par la société américaine de biotechnologie Bolt Threads

Le matériau des mille et un possibles

Alors que faire de ces champignons vraiment magiques ? Les idées se bousculent, et les compagnies, plus ou moins grandes, les cultivent dans toutes les directions. Dans le domaine du design, le mycelium s’est tout d’abord révélé être un allier de taille malgré son petit gabarit. Si les objets déco dans cette étrange matière se multiplient, c’est au niveau de l’emballage qu’a lieu la véritable révolution. Pour la marque de bougie française Amen, le problème était d’abord pratique. Leurs bougies vendues dans des pots en porcelaine arrivaient souvent cassées chez leurs acheteurs, et pour la marque hors de question de se tourner vers les emballages plastiques. Le mycelium s’est alors avéré être la solution idéale. Un emballage rapidement biodégradable, qui protège le produit tout en étant neutre en émission de carbone. Un petit pas à l’échelle d’une petite marque mais qui pointe du doigt un problème souvent éludé quant aux produits éphémères à l’image des bougies, qui si elles ne durent pas plus de 50 heures, voient leurs emballages mettre des siècles à se décomposer. Mais si les petites entreprises donnent le ton, nous ne pouvons que saluer l’engagement du groupe de luxe Kering qui a largement investi pour stopper la production de cuir animal, remplaçant ce dernier par un cuir végétal produit à partir de mycelium. Le Mylo, créé par la société américaine Bolt Threads, envahira dès le printemps 2021 les étagères des magasins de luxe du groupe, se retirant rapidement de la production animale. Le résultat bluffant, non polluant, et mettant fin aux souffrances animales dans le domaine du luxe, ne pourra que séduire les marques qui auront alors le loisir de cultiver leur propre cuir, de lui donner le grain, la couleur, et la texture de leur choix. Véritable caméléon, passant du cuir écolo au cercueil biodégradable, remplaçant papier bulle et autre polystyrène, le mycelium n’a pas fini de nous surprendre. Et c’est la planète qui nous dit merci.