L’expérience de l’espace par la matière

©Thibaut Voisin

Elle est partout autour de nous, et pourtant il nous semble parfois l’oublier. L’architecture est un élément central de notre quotidien, un sans lequel la société contemporaine ne serait pas ce qu’elle est aujourd’hui. Intrinsèquement liée à l’environnement et à l’espace, elle se fait dans l’exposition du Studio Mumbai pour la Fondation Quartier un lieu de questionnement. Abordant les thématiques de la matière, du sensoriel, mais rappelant également les ponts qui l’unissent à l’art et la nature, Le souffle de l’architecture nous invite à porter un regard nouveau sur cette pratique et notre rapport au bâti. Pour la Fondation Cartier, le fondateur de Studio Mumbai, l’architecte et designer Bijoy Jain a imaginé une exposition inédite en rapport avec le bâtiment conçu par Jean Nouvel, qui incite le visiteur à repenser son rapport à l’espace, mais aussi au temps et au silence. Direction Paris pour une rêverie architecturale aux frontières de la philosophie.

C’est dans le bâtiment imaginé par Jean Nouvel que s’installent les travaux d’un architecte venu de l’autre côté du globe. Bijoy Jain, né à Mumbai, en Inde, y installe sa propre agence en 1995 après avoir été diplômé de l’université de Washington, et travaillé auprès d’importants bureaux américains, à l’image de celui de Richard Meier. À la fois designer et architecte, il est aussi professeur, et enseigne sur les terres suisses, à l’Università della Svizzera Italiana de Mendrisio. Mais c’est depuis sa ville natale qu’il pratique son art et imagine des bâtiments qui viennent s’installer de part le monde. Ce créatif distingue son approche architecturale par un rapport étroit à la matière. Fasciné par les éléments, pour lui l’eau, l’air, la lumière, mais aussi le temps ne peuvent pas être séparés de l’architecture. Une approche unique qui relie directement ses projets à la question de la sensorialité et à notre rapport à l’objet. 

Lamento ©Cyril Marcilhacy

Pour son installation à la Maison Cartier, c’est cette relation qu’il a tenté de mettre en place en invitant une multitude de matériaux à s’exprimer dans l’espace. Ainsi, la terre et la brique côtoient la pierre et l’eau. Mais d’autres éléments, plus fugaces, omniprésents mais moins visibles, sont aussi convoqués. Parmi ceux-ci, la gravité et la légèreté, les jeux d’ombre et de lumière. Mais aussi le silence, que Bijoy Jain place au cœur de Souffle de l’architecture. « Le silence a un son, nous l’entendons résonner en nous. Ce son connecte tous les êtres vivants. C’est le souffle de la vie. Il est synchrone en chacun de nous. Le silence, le temps et l’espace sont éternels, tout comme l’eau, l’air et la lumière, qui sont notre construction élémentaire. Cette abondance de phénomènes sensoriels, de rêves, de mémoire, d’imagination, d’émotions et d’intuition provient de ce réservoir d’expériences, ancré dans les coins de nos yeux, dans la plante de nos pieds, dans le lobe de nos oreilles, dans le timbre de notre voix, dans le murmure de notre souffle et dans la paume de nos mains » confiait-il aux commissaires de l’exposition. 

©Cyril Marcilhacy

Les éléments se côtoient alors et échangent dans l’espace. Des sculptures en terracotta s’installent à côté d’éléments vernaculaires de l’architecture urbaine indienne, tandis que structures en bambous et constructions en briques s’additionnent aux créations invitées de la dessinatrice chinoise Hu Liu et aux travaux modelés de la céramiste danoise Alev Ebüzziya Siesbye. Un dialogue entre les matériaux et les formes qui se calque toujours sur l’espace, en réalité matière centrale à la pratique de Bijoy Jain, qui confiait, « L’espace et l’architecture doivent être inclusifs ». Une expérience spatiale, matérielle, métaphysique, à découvrir jusqu’au 21 avril prochain.

©Cyril Marcilhacy

 

Le souffle de l’architecture
Jusqu’au 21 avril 2024

Fondation Cartier pour l’art contemporain
261 Boulevard Raspail, 75014 Paris
www.fondationcartier.com