Conway The Machine : prose viscérale

Des textes crus, des samples lents, du boom-bap, et un flow unique, Conway The Machine s’érige comme le Messi du rap New-Yorkais. L’écouter, c’est voyager à l’époque du Wu-Tang Clan ou de Mobb Deep. Originaire de Buffalo, New York, ses titres dépeignent les séquelles de la société américaine, dont il porte lui-même les stigmates avec la moitié de son visage paralysée depuis une attaque en 2012. Le 23 avril prochain, c’est à l’Alhambra que The Spot Rap Session le convoque pour un concert mémorable. Close-up.

The Spot Geneva : Un pont entre les générations
Organisée par The Spot Geneva, The Spot Rap Session est une série de cinq concerts célébrant la cinquième année de collaboration entre les fondateurs du Festival Soulitude – Omar Chanan – et de Colors Record, Thibault Eigenmann. Cette fusion est le fruit de la volonté d’unir deux générations passionnées de musique : Colors Record, représentant des artistes tels que Makala, Slimka, et Varnish La Piscine, symbolise la nouvelle génération, et Soulitude incarnant celle de l’univers de la black soul musique. Au-delà d’un simple organisateur de concerts, The Spot Geneva offre un espace multifonctionnel consacré à la production de podcasts et à l’exposition d’œuvres d’art issues de la culture urbaine. Le 25 février dernier, à l’Usine Rez, le concert de GZA, co-fondateur du légendaire groupe hip-hop Wu-Tang Clan, inaugure The Spot Rap Session.

Griselda Record ©DR

Rap East-Coast
Pour saisir l’essence du rap de Conway The Machine, un retour dans les années 90, à New York, s’impose. En effet, avec son frère Westside Gunn et leur cousin Benny the Butcher ils sont perçus comme les étendards de la renaissance du rap New-Yorkais. Leur style rappelle l’époque du Wu-Tang Clan, Mobb Deep, Gang Starr, et Nas, fondamentale pour élever l’underground au rang de mainstream. Le rap de cette époque brise les conventions, expérimente des styles de production, impose l’usage de lyriques complexes et aborde des thèmes de lutte, et donne naissance aux rythmes légendaire du boom bap. ll a aussi prouvé que le hip-hop pouvait être à la fois profondément enraciné dans les expériences de la rue et universellement accessible. Cette ère dorée a posé les fondations sur lesquelles des styles comme la trap ont émergé, plaçant par la suite le rap d’Atlanta sous les projecteurs deux décennies durant. Aujourd’hui, c’est un retour aux sources qui s’impose.

La renaissance du rap New-Yorkais
Dans un paysage dominé par la trap, l’auto-tune, et des paroles souvent énigmatiques, Conway The Machine et sa bande remettent le rap New-Yorkais au premier plan. Leur style, initialement surnommé “Fly Shit” et désormais associé à leur label Griselda, renoue avec le boom bap, les samples lents, et les paroles qui dépeignent sans détour la réalité des trafics de drogue et du “hustle”. En 2012, Conway en fait les frais et survit à une tentative d’assassinat qui a paralysé la moitié de son visage, mais lui confère à son flow une unicité sans pareille. Des albums tels que « Pray for Paris » de Westside Gunn et « Tana Talk 3 » de Benny the Butcher, sont élevés au rang d’icônes dans les cercles de rap underground, Tyler the Creator allant même jusqu’à s’inspirer de Gunn pour un album entier. Classé parmi les tops rappeurs actuels, suivre les nouveautés de Conway est un véritable défi : rien qu’en 2023, il a sorti plus de quatre albums. Rendez-vous le 23 avril, à l’Alhambra pour un concert hors du temps.